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Prenez un auteur de romans (noirs, mais pas seulement) à l’imaginaire débordant d’idées. Prenez une jeune dessinatrice, tout juste sortie de l’école – des écoles, plutôt : chinois et sciences politiques, d’abord, puis Ecole Supérieure de l’Image d’Angoulême. Le premier, on ne le présente plus : il s’agit de Tonino Benacquista, à qui l ‘on doit (entre autres petits bijoux) Saga, L’Outremangeur ou La Maldonne des sleepings . La seconde, si : elle s’appelle Gabrielle Piquet, n’a que 28 ans et signe ici sa première bande dessinée - et son premier livre par la même occasion. Au fait, s’agit-il bien d’une bande dessinée ? Oui, si l’on veut bien admettre qu’une histoire en dessins n’a pas forcément besoin de cases tirées au cordeau pour mériter l’appellation de « bande dessinée ». En même temps, on s’en fiche complètement. L’essentiel, c’est qu’il y ait du texte, des dessins, des idées et du talent. De ces points de vue, Trois fois un (c’est le titre du recueil) est parfaitement réussi. Avec son trait tout en fragilité, d’une finesse méticuleuse et d’une légèreté aérienne, Gabrielle Piquet séduit d’emblée. Certes, les histoires de Benacquista sont pain bénit pour un dessinateur. Mais quand même, quand même… Avec cette manière si personnelle d’occuper l’espace, de mettre en scène la rue, de faire marcher les personnages dans une ville ou de dépeindre une foule de manifestants vociférant (c’est bien simple, on dirait presque du George Grosz, ce peintre allemand de l’entre-deux guerres), la jeune Gabrielle semble promise à un bel avenir. Les influences qu’elle revendique laissent augurer du meilleur : Sempé et Franquin, Gus Bofa et Will Eisner, sans oublier quelques cinéastes ou écrivains comme Scorsese ou Queneau. Que du beau monde… La première histoire est particulièrement savoureuse : elle raconte comment un jeune homme à qui son oncle à déclaré, sur son lit de mort, vouloir être enterré « près de la volière », va à la fois enrichir son vocabulaire et sa connaissance de la vie secrète du tonton en question. La deuxième n’est pas mal non plus, qui explique qu’il ne faut pas forcément être prêt à tout pour obtenir un scoop. Quant à la troisième, qui met en scène un gamin surdoué, elle recèle quelques idées graphiques particulièrement inventives et réussies. Bref, s’il n’est plus besoin d’apprendre par cœur le nom de Benacquista, déjà installé tout en haut du Panthéon des lettres contemporaines, il est vivement conseillé de mémoriser celui de la dessinatrice de Trois fois un. Souvenez-vous d’elle : elle s’appelle Gabrielle Piquet. Et elle devrait aller loin…