Abraxas
Jacques Audiberti1938

Synopsis

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Abraxas est une sorte de bateau ivre, un voyage poétique d’une rare densité, transportant le lecteur sur des routes autant étranges que déconcertantes. De fait il est beaucoup question de voyages, dans Abraxas, à commencer par celui du protagoniste principal, Caracasio, jeune peintre de Ravenne, missionné pour déposer de saintes reliques jusqu’à un lointain couvent de la ville d’Hertombreros, sise au royaume du Portugal. Le jeune artiste sera entraîné, malgré lui, dans des péripéties étonnantes, au cours de ses déambulations sur le dos de Fandelglass, son fantastique destrier, de l’Italie, en passant par la France et le Portugal. Le roman est un dépaysement constant malgré sa trompeuse proximité géographique. On y rencontre en effet, entre autre, dans cette Europe mi-réaliste et mi-imaginaire du quinzième siècle, des figures inquiétantes, des bancs de thon entraînant les nefs marchandes, des démiurges, des savants, des villes blanches et des villes hautes, un roi des gitans, des capitaines et des princes rêvant d’îles lointaines.

Abraxas, d’ailleurs, est-il vraiment un roman ? La question est légitime tant les flots des mots, long chant incantatoire entraîné par le rythme lent mais régulier d’une prosodie lancinante, semble balayer parfois toute velléité de construction narrative. Le récit, de fait, constamment, se décentre, abandonnant ses personnages, se perdant dans un exubérant tissu littéraire. On en vient à se demander si Audiberti lui-même savait vraiment où le mènerait son projet.

Pourtant, il y a un indéniable sentiment de cohésion, du fait de l’ambiance du roman, mêlant philosophie et geste épique. La thématique de la quête en particulier imprègne le livre et forme son squelette : la recherche de la compréhension du monde, à travers la science, l’art ou la spiritualité est une des motivations centrales des figures du roman. Les correspondances, et les symboles, largement utilisés par l’auteur, presque à satiété, fondent la diversité de cet univers et son unité.

Audiberti a peut-être voulu aussi faire de Abraxas un sortilège, ou une formule magique, pour nous montrer la puissance du Verbe, qui peut créer des mondes et les modeler à sa guise. L’écriture d’Audiberti, aussi intimiste qu’excessive, privilégie la mélopée, l’oralité du rythme, une certaine forme de douceur. Pourtant il y a de l’énergie aussi dans cette écriture, mais point d’envolée lyrique, plutôt une force toute intérieure. Cette prose, d’une grande beauté, mais ardue, voire décourageante, est émaillée d’images extravagantes confinant tantôt au grotesque, tantôt au sublime.

Publié en 1938, le roman d’Audiberti semble rétrospectivement aussi parler de la fin d’une époque et de l’avènement d’un nouveau Monde, annonçant à la fois, comme un coucher de soleil rougeoyant sur l’océan, une menace et une espérance.
(critiqueslibres.com)

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1938 Editions Gallimard (Blanche)

Française Langue française | 289 pages | ISBN : 0

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