#9 31 Août 2013 18:22:36
Juste fini Abattoir 5 de Vonnegut. Grosse, grosse claque. Ce n'est pas un roman de science-fiction ; c'est un roman sur la Seconde Guerre mondiale et sur la destruction de Dresde. Bien sûr, il y a plusieurs éléments de science-fiction, mais enfin... vous voyez, quoi. Ce bouquin entre directement dans le top 3 de mes lectures de cette année. Une écriture limpide, juste dosée comme il faut, une maitrise parfaite de la narration (ce qui n'est pas gagné quand on parle de voyages dans le temps — d'ailleurs, Vonnegut jongle avec les temps de narration comme personne), de l'humour à chaque page, mais sans tomber dans la potacherie ou le cynisme, ce qui, pour un bouquin traitant d'un sujet aussi grave, est est exactement ce qui convient. Vraiment, j'ai pris un pied gigantesque. Voilà un livre léger et rieur, écrit par un virtuose. Ça m'a un peu rappelé le style de Burton, ce regard amusé et égal sur les choses de la vie. Vonnegut tient lui même beaucoup de la philosophie tralfamadorienne, eh eh...
Voici un petit extrait plein de poésie, que j'ai adoré.
C'était un film sur les bombardiers américains de la Seconde Guerre mondiale et les héros qui les pilotaient. Entamée par la fin, l'histoire se déroulait ainsi sous les yeux de Billy :
Des avions américains transpercés de toutes parts, pleins de blessés et de cadavres décollent par l'arrière d'un aérodrome anglais. Au-dessus de la France, quelques chasseurs allemands rétrovolent dans leur direction, aspirant balles et éclats d'obus, les délogeant des appareils et des équipages. Même chose pour les zincs américains abattus qui s'élèvent à reculons et rejoignent l'escadrille.
La formation survole à contre-courant une ville allemande en flammes. Les bombardiers ouvrent leur trappe, déploient un magnétisme miraculeux qui réduit les incendies, les ramasse dans des cylindres d'acier et enfourne ceux-ci dans le ventre des coucous. Les gros cigares s'empilent régulièrement dans des râteliers. Au sol, les Allemands possèdent eux aussi des instruments prodigieux, de longs tubes d'acier. Ils s'en servent pour récupérer d'autres fragments arrachés aux hommes et aux avions. Les Américains comptent encore quelques blessés, et certains des bombardiers sont déglingués. Mais au-dessus de la France, les chasseurs allemands reparaissent et remettent tout et chacun à neuf.
Quand les bombardiers regagnent leur base, les cylindres d'acier sont ôtés des râteliers et réexpédiés aux États-Unis où les usines tournent nuit et jour pour les démanteler et séparer les dangereux composants, les réduisant à l'état de minéraux. Il est émouvant de voir que le travail est surtout accompli par des femmes. Puis on envoie ces minéraux à des spécialistes, dans des régions lointaines. Il s'agit pour eux de les enfouir, et de les dissimuler habilement, afin qu'ils ne puissent plus jamais nuire à personne.
Les aviateurs rendent leurs uniformes, se transforment en lycéens. Et Hitler se change en nourrisson, selon Billy Pèlerin. Cela ne faisait pas partie du scénario. Billy extrapolait. Tout le monde redevenait bébé, et l'humanité entière, sans exception, se livrait à une vaste conspiration biologique dans le but de donner le jour à deux êtres parfaits, Adam et Ève ; toujours d'après les déductions de Billy.
Je continue sur Pelot en attendant de recevoir les autres bouquins de Vonnegut que j'ai trouvé sur le Net. Je suis en manque !
Dernière modification par Vidéni (31 Août 2013 18:25:41)